Avec sa nouvelle exposition Sur la piste des Sioux, du 22 octobre 2021 au 28 août 2022, le Musée des Confluences de Lyon raconte la construction, au fil des siècles, en France et en Europe, de l’image de « l’Indien d’Amérique ». Compte-rendu de visite avec notre envoyée spéciale Dominique Rochard.
Visite de l’exposition
Sur la piste des Sioux
Tipi, plume, bison, calumet de la paix, flèche, tomahawk, coiffe. Aujourd’hui encore, ces mots sont les plus cités par les Français pour décrire les cultures des populations natives de la moitié nord du continent américain. Pourtant, ces symboles sont loin de représenter la totalité des nations qui vivaient en Amérique du Nord avant la colonisation.
Suivant un parcours chronologique en cinq étapes, l’exposition montre comment s’est construite l’image de « l’Indien d’Amérique » en France et en Europe depuis l’arrivée des premiers colons au 16e siècle jusqu’à nos jours. Elle commence par les premiers contacts pour s’achever par les nouveaux stéréotypes en partie hérités de la mouvance New Age. Sur une carte des États-Unis, chaque époque est ponctuée d’une borne américaine indiquant la réalité de la situation des nations indiennes dont les territoires s’amenuisent au fil des siècles et dont la culture est progressivement détruite.
Un ensemble très riche de récits de voyages, peintures, croquis et dessins évoque la première époque (1497-1849) alors que la seconde (1851-1934) met en avant les romans, photographies et feuilletons de la presse. Des films d’époque font également revivre les premiers spectacles itinérants dont le très célèbre Buffalo Bill’s Wild West. De 1882 à 1912, ce show est connu pour avoir mis en scène cette image des Peaux-Rouges, ces sauvages de l’Ouest, avec attaques de diligence, chasses aux bisons et batailles célèbres. Ces spectacles populaires ont sillonné l’Amérique du Nord ainsi que l’Europe, dont la France, la Belgique et l’Allemagne. Ce sont eux qui vont ancrer la représentation de tous les Indiens d’Amérique au nombre desquels, les Sioux. Cette image fantasmée est renforcée par les exhibitions d’Indiens des Plaines dans les grandes expositions universelles de Paris (1889 et 1911), d’Anvers (1894) et de de Bruxelles (1935). Seuls avantages pour les familles participant à ces simulacres : elles touchaient un salaire, mais le plus important pour elles était encore de pouvoir pratiquer leurs chants et leurs danses traditionnels, activités totalement interdites aux États-Unis.
En poursuivant l’exposition, le visiteur découvre comment, entre 1941 et 1972, l’image stéréotypée de l’Indien envahit de nouveaux champs comme la publicité, la bande dessinée et bien entendu le cinéma hollywoodien. Avec les Westerns, les États-Unis célèbrent l’héroïsme des pionniers et des tuniques bleues face aux sauvages Peaux-Rouges. Aujourd’hui, d’autres stéréotypes ont vu le jour comme celui de l’Indien connecté à la Nature, porteur de spiritualité et en quête de ses racines. Pourront-ils et seront-ils un jour considérés comme des Américains à part entière ?
Le « clou » de l’exposition réside dans la mise en scène de la remarquable collection d’objets lakotas de François Chladiuk, collectionneur belge. Contacté par un antiquaire en 2004, il achète huit malles en métal remplies d’objets indiens authentiques des années 1920-1930. Le propriétaire d’origine avait acheté ces objets à des Indiens lors de l’Exposition universelle et internationale de Bruxelles en 1935. Grâce aux photographies d’époque détenues par divers contacts et à son propre fonds d’anciennes photographies, François Chladiuk identifie 34 des pièces de la collection ainsi que le nom de familles indiennes présentes à Bruxelles en 1935. En 2006, il part aux États-Unis à la recherche de l’une de ces familles, les Littlemoon, basée dans le Dakota du sud. C’est ainsi qu’il rencontre Moses et Walter Littlemoon, les deux fils de Joe et Rose présents à l’exposition de 1935. Issues de sa collection, ce sont quelques 150 pièces (coiffes, parures, gilets brodés de perles, mocassins et objets rituels) qui sont exposées dans quatre vitrines. Chaque vitrine est dédiée à une famille indienne présente à Bruxelles avec les objets qui ont pu leur être associés.
Une exposition aussi émouvante qu’impressionnante par le travail de fourmi qu’elle représente. À visiter, en prenant le temps de s’immerger dans ces destins surprenants d’une autre époque.
Musée des Confluences – Lyon
Sur la piste des Sioux
Chef du projet collaboratif incluant un comité scientifique et deux experts : Yohan Cormier
Chargé d’exposition : Jean-François Courant
Tarif : 9 € pour toutes les collections
86 quai Perrache 69002 – www.museedesconfluences.fr
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Pour aller plus loin
- voir la présentation de l’exposition sur le site du musée des Confluences
- accéder à l’interview du collectionneur François Chladiuk
- découvrir l’histoire des mocassins de la famille Littlemoon
- Musée des Confluences, Sur la piste des sioux, éd. Snoeck Gent, 2021
- Arts in the City, Sur la piste des Sioux, partez à la conquête de l’Ouest au Musée des Confluences – Vidéo exposition, 25 novembre 2021 – Découvrez l’exposition sur YouTube en 3 minutes.
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