ArkéoSpot au colloque : Voués à Ishtar

À l’occasion du 80ème anniversaire de la découverte de Mari par André Parrot, le Musée du Louvre a organisé le colloque

Voués à Ishtar. Syrie, janvier 1934 :
André Parrot découvre Mari

SAMEDI 22 FÉVRIER 2014
DE 10H00 À 18H00

ArkéoTopia était présent pour un ArkéoSpot dont nous avons le plaisir de vous restituer les quatre communications les plus novatrices de la journée.

Présentation

Les intervenants principaux du collloque. De d. à g. P. Butterlin, S. Cluzan et J.-Cl. MargueronArrivée au lieu-dit du tell Hariri en décembre 1933, l’équipe d’André Parrot décida le 15 janvier 1934 de porter ses efforts sur une des buttes de l’ouest de la colline. Le 22 janvier, une tête de statue masculine aux yeux incrustés de lapis-lazuli émerveilla le fouilleur. Le 23 janvier réapparurent le corps qui s’ajustait à cette tête exceptionnelle, une seconde statue masculine en habit royal, une troisième à l’austère visage. Toutes portaient une inscription, incisée dans le dos. Le roi offrit au fouilleur le nom de la ville ancienne qu’il découvrait, Mari. Les trois statues mentionnaient la propriétaire des lieux où ils s’étaient rassemblés, la déesse Ishtar. Ce jour de janvier, Ishqi-Mari, Ebih-Il et Iddi-narum scellèrent le destin d’une mission française d’exception et qui ne connut d’interruptions que celles que lui imposèrent la seconde Guerre mondiale et les récents événements.
Ce colloque permettra de dresser le bilan de la recherche sur un des monuments les plus importants de cette métropole du IIIe millénaire (ca. 2500-2300), le temple de la déesse du pouvoir et de la guerre.

Nous mettons à disposition l’introduction du Pr. Jean-Claude Margueron car, bien au-délà de la recherche archéologique sur l’Orient, sa prise de position durant ce colloque a des conséquences épistémologiques que nous défendons au sein d’ArkéoTopia capables de dessiner une nouvelle archéologie où la fouille n’est plus au centre de la recherche, mais l’objet d’étude même de l’archéologie : l’analyse du matériel produit par l’être humain.

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Le temple d’Ishtar : ce que l’on peut en dire 80 ans après la fouille

Une analyse de l'architecture du temple d'Ishtar renouvelée grâce à l'analyse des plans et photographies d'A. ParrotUne analyse très approfondie des données que l’on peut retenir de la publication du temple d’Ishtar permet de brosser une image renouvelée du premier édifice retrouvé à Mari par André Parrot. Trois conclusions permettent d’envisager le temple d’Ishtar sous un jour nouveau. La première, c’est qu’il convient de réduire le nombre des phases. Il y a deux temples et non trois : le temple d’Ishtar ancien qui regroupe les niveaux c et d d’André Parrot et le temple d’Ishtar récent formé par le temple a. Une deuxième conclusion établir que les deux niveaux, Ishtar ancien et Ishtar récent sont pratiquement identiques et qu’il suffit d’en étudier un pour connaître l’autre. La troisième et dernière conclusion concerne les caractéristiques de son environnement : le temple a été édifié sur une infrastructure compartimentée comme l’ensemble de la cité de Mari, ce qui implique que son organisation avait été complétement planifiée avant même sa construction.

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Pr. Jean-Claude MARGUERON
Agrégé d’histoire, docteur d’Etat avec une thèse sur les palais mésopotamiens en 1978, Jean-Claude Margueron, ancien pensionnaire de l’Institut français d’archéologie de Beyrouth (aujourd’hui IFPO), a pendant 20 ans enseigné l’archéologie orientale à l’université de Strasbourg, avant de devenir Directeur d’Etudes à l’École pratique des Hautes Etudes (section des sciences historiques et philologiques).
Il a débuté sa carrière d’archéologue de terrain en 1954 en Syrie à Mari ; il l’a poursuivie en Irak et en Iran puis, après avoir dirigé les missions de Larsa (Irak), d’Ugarit et d’Emar (Syrie), il a assumé de 1979 à 2004 la direction de l’exploration de Mari.
Il est auteur de nombreuses publications dont L’Art de l’Antiquité en collaboration avec A. Forgeau, M. Salvini, P. Amiet, 1997 et Mari : Métropole de l’Euphrate au IIIème et au début du IIème millénaire av. J.-C., 2004.

L’« Étendard de Mari » : les avatars d’un « panneau de la Guerre »

Différentes hypothèses de restitution, qu'en faire aujourd'hui ?Parmi l’ample moisson d’œuvres d’art et d’objets précieux livrés par le temple d’Ishtar, les pièces d’incrustation figuratives en coquille nacrée tiennent une place non négligeable. Ces petites plaquettes, découpées et dont les lignes gravées étaient réhaussées de bitume pour marquer les détails internes des objets ou des personnages représentés, se détachaient sur un fond de pierre sombre ; des baguettes, de pierre rouge et de nacre, indiquent que les scènes étaient agencées à l’intérieur d’un cadre et vraisemblablement en registre supersposés. La documentation laissée par l’équipe d’André Parrot avait rendu une restitution qu’il n’est plus permis de conserver aujourd’hui. Comment restituer la réalité de la représentation originale aujourd’hui ? Outre la présentation des nouvelles connaissances sur la qualité des matériaux, c’est ce que nous nous attacherons à présenter.

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Un détail qui change la compréhension de l'agencement iconographiqueDr. Béatrice Muller
Directeur de recherches au CNRS (UMR 7041 – ArScAn, Archéologies et Sciences de l’Antiquité, équipe VEPMO – Du village à l’État au Proche et Moyen-Orient), chargée de cours d’histoire de l’art et d’archéologie du Proche-Orient ancien pré-classique à l’université de Poitiers et accréditée à diriger des thèses à l’université Paris I, Béatrice Muller est membre des missions archéologiques françaises en Syrie de Meskéné-/Emar, Tell Hariri/Mari et Ras Shamra/Ugarit. Ses thèmes de recherche touchent principalement à l’iconographie de l’architecture. On lui doit une soixantaine d’articles dans Syria, M.A.R.I et plusieurs ouvrages ou actes de colloque dont notamment, en 2002, l’édition de Maquettes architecturales de l’Antiquité : regards croisés (Egypte, Proche-Orient, bassin égéen, Grèce, du Néolithique à l’époque hellénistique), actes du colloque de Strasbourg de 1998 (Travaux du Centre de Recherche sur le Proche-Orient et la Grèce antiques n° 17).

À propos du temple d’Ishtar de Mari : questions de glyptique

La glyptique de Mari par D. BeyerC’est au temple d’Ishtar, et dans ses environs immédiats, qu’ont été découverts les premiers sceaux-cylindres de Mari, soit une cinquantaine de pièces. Ceux du temple proprement dit, 19 pièces seulement, très dispersées, appartenaient sans doute sans doute au personnel du temple car il est difficile de dire s’ils avaient fait partie initialement du trésor de la déesse. En fonction des différents contextes de découverte, ces sceaux s’échelonnent dans le temps sur plus d’un millénaire, mais la plupart appartiennent à la Ville II, et surtout au XXIVè siècle av. J.-C. Certains documents plus anciens, de qualité nettement supérieure à la production courante, par le matériau comme par le décor, ont été considérés comme importés de Mésopotamie méridionale. La question se pose alors de l’existence d’ateliers de graveurs de sceaux locaux de haut niveau, susceptibles d’innover et de ne pas simplement s’inspirer des œuvres du sud. Les découvertes de la dernière décennie, en particulier des empreintes de deux sceaux du roi Ishqi-Mari, rendu célèbre par sa statue du temple d’Ishtar, ont permis d’accroître la documentation et d’alimenter le débat.

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Pr. Dominique BEYER
Après des études universitaires à Strasbourg et à Paris, Dominique Beyer entre en 1975 vomme conservateur au département des Antiquités orientales du Musée du Louvre. Depuis l’automne 1990, il enseigne comme professeur à l’université de Strasbourg, où il dirige l’Institut d’histoire et d’archéologie de l’Orient ancien. Spécialiste de la sigillographie, ses thèmes de recherche porte également sur l’architecture. Il a participé à plus d’une quarantaine de campagnes de fouilles en Orient, de la Turquie et Chypre au golfe Arabo-persique, en passant par l’Irak et la Syrie où s’est déroulé l’essentuel de ses activités. Après Méskéné et Tell Faq’ous dans les années 1970, il fouille depuis 1979 à Mari. Après avoir dirigé les missions de Ramadi et de Mashnaqa en Syrie, il se consacre, depuis plus de dix ans, à l’exploration du site turc de Zeyve hÿük-Porsuk en Cappadoce méridionale.

La communication de Dominique Beyer fut particulièrement intéressant par rapport au repentir du chercheur sur la restitution de son dessin d’un sceau-cylindre où il avait oublié de rendre la barbre au personnage royal avec des implications importantes dans l’interprétation, détail qui montre la difficulté de l’analyse iconographique et son improtance dans la compréhension des civilisations du passé.

La place de la statuaire votive du temple d’Ishtar virile dans la sculpture de la ville II de Mari

Analyse de la répartition spatiale du matériel et indices d'analyse de la statue d'Ebikh-IlLe corpus de la statuaire votive du temple d’Ishtar permet de dresser un tableau comparatif des différents espaces qui le composent. Une répartition préférentielle s’établir, qu’il convient d’analyser en étroite relation avec l’identité de la divinité qui y est honorée. La présence de trois statues d’officiels du royaume illustre le caractère particulier de l’édifice, faisant écho au particularisme de son architecture et de sa position dans l’espace urbain. La conférence proposera de dégager ses spécificités en faisant appel, à titre de comparaison, aux ensembles retrouvés dans les deux autres grandes sanctuaires de la cité, les temples d’Ishtarat et de Nini-ZAZA.

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Dr. Sophie CLUZAN
Archéologue et conservateur du patrimoine au département des Antiquités orientales du musée du Louvre, Sophie Cluzan a participé à de nombreuses missions archéologiques en Orient, Grâce à une analyse fine, une nouvelle compréhension de la statue d'Ebikh-Ildepuis Chypre, la Syrie, la Jordanie et jusqu’à l’Inde. Parallèlement, elle a été commissaire d’exposition dont une sur la Syrie à l’Institut du Monde Arabe ainsi que celle de ce colloque : Voués à Ishtar. Syrie, janvier 1934 : André Parrot découvre Mari.

Conclusion
Nous mettons à disposition la conclusion du Pr. Jean-Claude Margueron pour les mêmes raisons que nous mettons son introduction. Bien au-délà de la recherche archéologique sur l’Orient, sa prise de position durant ce colloque a des conséquences épistémologiques que nous défendons au sein d’ArkéoTopia capable de dessiner une nouvelle archéologie où la fouille n’est plus au centre de la recherche, mais l’objet d’étude même de l’archéologie : l’analyse du matériel produit par l’être humain

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Pour aller plus loin…

Mise à jour du 24 Février 2014
Écouter en streaming les enregistrements du colloque du 22 Février 2014 à partir des liens ci-dessus
ou téléchargez les mp3 des conférences du Pr. J.-Cl. Margueron (26 Mo), du Dr. B. Muller (34 Mo), du Pr. D. Beyer (20 Mo) et du Dr. S. Cluzan (23 Mo) (Pour les enregistrer sur votre disque dur, faites un clic-droit sur le lien et choisissez “Enregistrer la cible du lien sous…”) – ces ressources sont mises à disposition 5 mois à compter de la date de mise à jour.

RAPPEL: l’annonce des ArkéoSpots est faite aux adhérents sur le forum à la rubrique ArkéoSpot pour la présentation du sujet et dans l’agenda adhérent pour les dates, horaires et lieux.