Voyage au Fayoum
- Mis à jour : mardi 8 juin 2021 09:39
- Publication : mercredi 1 avril 2020 16:59
- Écrit par Anne Radigue
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Découvrez la région du Fayoum avec Anne Radigue. Destination peu fréquente, Anne vous raconte les merveilles culturelles et naturelles qu'elle a découvertes dans cette région durant son voyage touristique d'octobre 2019.
Le Fayoum : destination insolite en Égypte
Sortir des sentiers battus en Égypte n'est pas chose aisée, le Ministère des Affaires Étrangères (MAE) français restreignant les zones sécuritaires aux régions les plus touristiques : les abords du Nil, depuis Assouan jusqu’à Louxor, Abu Simbel plus au sud, Le Caire et certaines côtes de la Mer Rouge. Pourtant d'autres endroits valent le détour.
La région du Fayoum en est un parfait exemple : ignorée des touristes, alliant nature inaltérée, sites paléontologiques et vestiges archéologiques, elle reste accessible, le MAE indiquant qu'il est possible de s'y rendre, à condition d'éviter la ville de Medinet-el-Fayoum.
Un héritage géologique et paléontologique varié
Le Fayoum est une dépression située à 130 km au sud-ouest du Caire. La zone est particulièrement connue pour le lac Qârûn (lac Moéris), immense réservoir qui offre de l'eau aux populations locales.
Le désert compose l’essentiel d’un paysage qui recèle plusieurs points d'intérêts : la Vallée des Pastèques, ainsi nommée en raison des pierres arrondies au fil des ans par les vents et le sable qui recouvre son sol ; un lac scintillant dont les bords regorgent de petites pierres en forme de pièces de monnaie ; des dunes, plus ou moins hautes, offrant une vue à couper le souffle. Le lac Qârûn lui-même mérite une visite : une promenade en barque permet d'observer les pêcheurs utilisant des bouteilles en plastique dans leurs filets et de baigner dans la lumière d’un beau soleil couchant rose.
Le Fayoum fut aussi le théâtre d'une importante vie maritime il y a quelques 40 millions d'années. En effet, à la place d'un désert s'y trouvait la Mer de Téthys. La biodiversité d’alors comprenait entre autres des baleines paléontologiques et une mangrove foisonnante : aujourd'hui encore, le désert en garde des témoignages. Les sites de Ouadi al-Hitan et la forêt pétrifiée en sont les éléments les plus marquants.
Ouadi al-Hitan, aussi dénommé la Vallée des Baleines, se situe au bout d'une longue route de sable blanc. Le lieu comporte un petit musée, installé dans des bâtiments ronds en briques, qui raconte l'histoire du lieu et les recherches menées par une équipe de l'université du Michigan dans les années 1980 et 1990. Des ossements de différentes espèces de cétacés ont été retrouvés et étudiés et un parcours balisé dans la vallée permet désormais d'admirer leurs restes, mais aussi des troncs d'arbres fossilisés. Certains squelettes vous impressionneront par leur colonne vertébrale très bien conservée.
Quant à la forêt pétrifiée, elle est constituée de troncs d'arbres et de morceaux de bois jonchant le sol. Fossilisés en pierre, ils ont toutefois conservé l'aspect du bois et offrent une vision évocatrice du Désert Noir. La forêt date d’il y a 35 millions d’années, quand la région était encore une zone humide. Pour y accéder, le 4x4 vous sera indispensable afin de gravir les dunes. La forêt se trouve en effet en hauteur, isolée.
Une richesse archéologique méconnue
L'archéologie est une autre attraction majeure du Fayoum. Les vestiges ne sont peut-être pas aussi grandioses que ceux de la Vallée des Rois ou de Karnak, mais vous les aurez pour vous tout seul. Ils révèlent la fascination de cette région pour le dieu Sobek à l'époque ptolémaïque (332 à 30 avant J.-C).
Plusieurs sites présentent un réel intérêt, dont Qasr Qârûn, le temple de Rénénoutet de Médinet Mâdi et la Pyramide de Meïdoum.
Qasr Qarun, localisé dans l’ancienne ville gréco-romaine de Dionysias, est un petit temple dédié à Sobek. Dans la pénombre de l’intérieur, des escaliers étroits mènent au toit, d’où l’on peut admirer les environs. La visite est de courte durée mais le lieu vous appartiendra l’espace d’un instant.
Pour visiter Médinet Mâdi, il faut se rendre dans la réserve naturelle de Wadi El Rayan et emprunter une longue route sablonneuse. À demi ensevelies dans le sable, les ruines du temple sont gardées par des hommes armés. Consacré à Sobek ainsi qu’à la déesse cobra Rénénoutet, le temple a été construit par Amenemhat III et Amenemhat IV (Moyen Empire). On déambule dans le site entre colonnes et murs en ruine.
Enfin, la Pyramide de Meïdoum est la première tentative d’une construction de pyramide. Commandée par le Pharaon Huni (2637-2613 av JC, Ancien Empire), elle fut finalement construite par son fils, Snéfrou. Ce dernier construira par la suite d’autres sépultures, telles que la pyramide rhomboïdale, c’est-à-dire qui a la forme d’un losange (Dahchour-Sud), et la pyramide rouge (Dahchour-Nord). La première tentative ne fut pas parfaite, et le poids de la pyramide provoqua des dégâts importants. D’autres pyramides peuvent être visitées dans la région, telles que celles d’Hawara et d’El-Lahoun.
Une excursion qui ne s’improvise pas
Le recours à une agence de voyage facilite l'organisation : un guide se chargera du moyen de transport et des laissez-passer pour les barrages militaires.
Les autorités sont soucieuses de préserver l’image du pays auprès des touristes. Ainsi, la police nous a imposé une escorte, ce qui eut un impact sur notre programme : nous avons dû changer le logement initialement prévu - l'autre option étant de quitter tout simplement la région - pour aller dans un lieu mieux sécurisé. Nous avons donc logé à Tunis, petit village de potiers. Nous avons dû aussi renoncer à la visite de la pyramide de Meïdoum, fermée pour des raisons de sécurité.
Mais la région mérite amplement d’être visitée. Pour les touristes les plus aventureux, qui souhaitent partir à la découverte d’une autre facette de l’Égypte, le Fayoum est une parenthèse atypique dans un voyage généralement plus balisé.